Yves
Yacoël
des
pixels dans les feuilles de ville |
Le pixel sème le trouble dans les en-jeux de l'effacement. Il met la gomme. On entend derrière l'écran (il court il court le pixel du bois joli...). Nouvelle étape d'une mémoire graphique qui renaît de ses cendres, poussée par une technique qui se fait insaisissable et s'illustre de pixels "pensants". Aux hommes de prendre la parole. Rêve de page, blanche d'un écran gris souris aux grains palpables. Ils font penser au talc ou à une poudre de riz rendant la fantasmagorie de leur propre visage, animé ou figé sur la rétine d'un écran toujours plus fin. Pixel à l'image d'une société myrmécophile sans révéler l'ordonnance première de celle-ci. Les questions se posent. Sommes-nous bâtis dans cet ordre des choses sans le savoir, virtuel cloné au réel? De l'art ou du cochon, il n'en naît rien: plus de graisse, seulement l'enveloppe. Il suffirait d'un souffle pour nous dire que tout est poussière... de pixels? Ainsi le futur (?) offrant l'air libre en aire de projection aux liens d'un arbre généalogique sans racines, pris aux ordres du subliminal, "qui vivra vert @ Yves Yacoël, février 2002 |
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PASTILLAGE ARTISTIQUE Pastillage sur corps 99 ©Yves Yacoël
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Les
14 et 15 octobre derniers se tenait, sous les arcades du Théâtre
de l'Odéon, le septième Marché Foire de
l'Odéon consacré aux arts du livre contemporain.
(...) Insérés dans de grandes bâches transparentes
qui fermaient les arcades et protégeaient le chaland des
vents coulis, les "pastillages" d'Yves Yacoël
jetaient des couleurs d'autant plus vives que le ciel était
d'un gris très parisien. Grâce à une technique
de pixellisation parfaitement maîtrisée par l'artiste,
qui crée une "mosaïque réelle ou virtuelle
éphémère", trente-huit "petits
mutants" réchauffaient les murs de leurs couleurs
éclatantes et invitaient à entrer dans la ronde.
Anne-Laure Blanc, revue Arts et
Métiers du Livre, n° 222, déc. 2000 Inventeur du pastillage, depuis plus de 15 ans, Yves Yacoël explore l"univers de la gommette autocollante. A l'origine de sa démarche, une constatation avant-gardiste : en 1984, avec l'apparition progressive des ordinateurs, Yves Yacoël réalise que l'art traditionnel va tendre à être supplanté par l'art numérique. Et c'est en matière de pied de nez aux (nouvelles) technologies de l'époque, qu'il abandonne pinceaux et crayons, non pas au profit d'une souris, mais pour des pastilles rondes, carrées ou rectangulaires. Graveur sur bois, styliste et plasticien à l'origine, Yves Yacoël a compris avant beaucoup d'autres l"esthétique du pixel grossi. Pastilleur fou... avec ses pastilles, Yves Yacoël compose des mosaïques, dans lesquelles il intègre fourmis, mutants ou martiens qui semblent tirés tout droit du jeu vidéo mythique Space Invaders. Malgré la forte ressemblance entre ses créations et les extra-terrestres de ce jeu vidéo, Yves Yacoël confesse n'avoir jamais beaucoup joué sur ordinateur, étant peu doué pour l'informatique. Ses premiers pastillages, il les réalise en 1985 sur les corps de danseurs, puis sur des vêtements. Avec le temps, il s'intéresse à d'autres supports. En avril dernier, il recouvrait les façades du théâtre de l'Odéon de grandes bâches pastillées de ses créatures. Les arbres parisiens se voyaient, au même moment, décorés de "feuilles électroniques", également pixellisées, imitations de vraies feuilles, mais réalisées en vinyl. Autre création, sa mascotte, Exylt (prononcez "exit"), l'accompagne partout, de Paris à San Francisco, pantin de bois, lui aussi composé de pixels, articulé par des charnières et recouvert de toile de jean... Benoît Méli, article mis en ligne le 19 07 01 sur le magazine TRANSFERT <www.transfert.net> |
suivre la
piste des feuilles de ville, des pixels light et autres mur-sticks*
Pastillage, ronde du pixel
Carte postale-pastillée, 1989, ci-dessus, et ci-contre, planche de 24 pastilles autocollantes avec "mutants", insert revue Enfant d'Abord,1990 *Stickers sur la Ville: grand collectif de stick-art à La Loge de la Concierge, octobre 2002.
DE L'ORDINATEUR
A LA FOURMI Le pixel: point coloré. La combinaison de plusieurs de ces points permet la fabrication d'images. Elle permet, plus exactement, la traduction de ce que l'oeil voit, en volume et dans la nature, sous la forme de documents en deux dimensions. Mais il y a plus: le peintre ou le dessinateur savent produire cet artificialisme sur la toile ou tout autre support. Ils le font avec de la matière: gouache, huile et pigments, graphite, etc. Mais quel que soit le caractère analytique de la démarche de certains d'entre eux, ils ne cherchent pas à composer l'image à partir de l'infiniment petit. En revanche, la reproduction photographique, télévisuelle, etc. impose une déconstruction systématique, jusqu'à la définition de plus petit élément, ce qu'on appelle l'élément d'image, le pixel. Ce systématique dans l'artificiel a séduit Yacoël. En travaillant d'un élément simple en couleur, l'équivalent de la cellule pour le corps et de l'atome pour la matière, il compose à son gré les formes les plus diverses. Ce faisant, il rejoint les modes d'expression que l'humanité pratique depuis des lustres : l'écriture typographique, entendue comme une combinaison à l'infini de caractères limités par convention en nombre; l'écriture musicale qui agence, elle aussi à l'infini, une quantité limitée de signes ; l'écriture architecturale, qui fait de même. Une grosse différence, cependant : Yacoël limite de façon beaucoup plus stricte encore ses propres types, ronds colorés, rectangles, barres. Reste à les combiner. La réflexion de Yacoël ne se limite pas à l'élaboration d'une écriture d'un artificialisme en phase avec celui des actuels moyens de reproduction de l'image. Il a depuis longtemps exploré les capacités de la gommette autocollante : finies les boîtes de couleurs, les palettes et les crayons, place aux pastilles du papetier qu'on détache du papier lisse. Avec elles il est désormais possible de travailler sur tout support propice, de tatouer de gommettes le buste d'une femme, le torse d'un homme, un visage, une feuille de papier translucide. Juste le temps d'une performance, ou pour durer. Ce n'est toujours pas tout. Yacoël a longtemps fait le
choix de combiner des formes abstraites, d'étranges géométries,
de plus en plus complexes. Puis, ces formes ont pris vie ; des
compositions zoomorphiques sont apparues. Aujourd'hui une fourmi
débonnaire est apparue, avec une grosse tête aux
yeux écarquillés et des fesses arrondies comme
l'abside de Notre Dame de Paris ; elle lève ses pattes
antérieures pour souhaiter la bienvenue ; elle a le ventre
vide, mais se porte apparamment bien. Son gigantisme ne fait
pas peur : elle est même très sympathique, cette
fourmi luminaissante. D'ailleurs les enfants ont toujours
aimé les fourmis. exposition 20 Temps de Pastillage |