De la plume à la main... La main, ou le cinq... C'est la main qui détermine la mesure des choses, ses cinq doigts pour les compter, l'index pour les désigner et les nommer, les deux autres pour faire la paire, et le petit dernier pour faire "chic, chic".

La main-outil, la main de l'outil, l'outil de la main. A l'image de cette main, et surtout de celle des "Grands Ancêtres" du Shukaba, sont les outils qui la prolongent, la remplacent.
On trouvera représentés ci-dessous les outils servant à la calligraphie: une plume de verre filé à torsades, une plume en or en forme de main, dont deux doigts font le bec, pour le un. Pour le deux, il y a la plume carrée à deux becs, peu usitée, et le double-pinceau, d'usage plus courant. Trois n'est pas représenté, car il ne nécessite pas d'outil spécial: c'est le deux avec le contre-point du un. Le quatre non plus, c'est le deux multiplié.

La plume à cinq becs, elle, est d'un usage fort courant, car elle est rapide et sûre, elle permet de dessiner directement les caractères issus de la main-pinceau.

Le plus spectaculaire est le cinq, représenté par un outil principal, assez complexe, destiné à reproduire la calligraphie à cinq lignes des Grands Ancêtres. (Ceux-ci avaient sur la tête un grand ongle, qu'ils limaient, sculptaient, peignaient, et des touffes de poils là où nous avons des ongles).

Il est constitué, comme on peut le voir ci-dessous, de cinq pinceaux munis de bagues de tailles différentes pour chausser chaque doigt. Cet outil réclame une très grande dextérité, beaucoup de souplesse et d'indépendance des doigts entre eux, en même temps qu'une parfaite coordination. Ceci en plus de la connaissance de l'ordre dans lequel les caractères calligraphiques devront être exécutés, je devrais dire déroulés, selon qu'il s'agit d'une calligraphie horizontale ou d'une calligraphie verticale.

La chorégraphie de la calligraphie se fait aussi avec cet outil, manipulé par une danseuse qui exécute sur le décor même où elle danse, une sorte de glossolalie visuelle. La brosse à cinq toupets n'est que le dérivé, en plus simple, du précédent. Elle est plus aisée à manipuler, et, bien qu'on puisse faire avec de très jolies choses, on s'en sert moins pour la calligraphie sur papier que pour la peinture corporelle.

SHUKABA
photographie d'archive
montrant l'un des stades de la
lente mutation de la main
aux ongles-pinceaux en
main ongulée actuelle.
On remarquera que les
poils sont en train
de devenir des ongles.

Ci-dessous à droite,
l'outil de calligraphie
qui a remplacé
la main archaïque,
reconstitué très
fidèlement par
Bruno Livory 

Hélène Taddeï, danse, dans le décor peint Glossolalie visuelle, photos Chris Morandi


©May Livory 

 
©May Livory


 ©Chris Morandi

 

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