2006
à La Loge de la Concierge
LA PASTILLE
phonème
en refrain, pilule
de poésie minuscule,
poème en rond qui
commence et finit
par le même
faux nez
pastilles de poésie
CDlivres

Barde la Lézarde

La Loge
de la Concierge
14 rue du Pont-Neuf 75001 Paris

calendrier des expos

du 2 au 14 Mars
exposition 15h à 20h, du lundi au vendredi
vernissage 2 mars à 18h - lectures à 19h les 3, 7, 14 mars

Coeur sur la ville / la ville à coeur...
Paris-New York (photographies, des séries Paris Ville Ténèbre, Egypte et Manhattan Gris), Henri MACCHERONI
Invalides et Des Agréments (photos et photo-collages), Paul STEFANI
Dégoulinade (installation) et Appellation incontrôlée (vidéo), Alphonsine DAVID
Monture à fenêtre (sculpture-installation), Marie SCHUCH
JR-Expo2rue (photos portraits street art) et Mire project (street art)

Coin livres et lectures: éditions Le Pli, Champtin, Desnel, Taor, Barde la Lézarde
Desnel: sortie du recueil de poésie Prosopopées Urbaines

coordonné par Suzanne DRACIUS, présente le 14 pour la dernière soirée de lectures et la clôture de l'exposition
Editions Barde la Lézarde: sortie de nouveaux CDlivres (Elizabeth QUERBES, MIRE Project)

Kant définissait le bonheur "comme agrément sans rupture du sujet à sa vie".
"mais alors, dit Alice, si la vie n'a absolument aucun sens qui nous empêche d'en inventer un?" (Lewis Caroll)

DES AGREMENTS (suite)
Les INVALIDES (bis)
On m'a demandé, avec bienveillance, de m'expliquer... Devant la difficulté de dire quelque chose de mon travail, un ami que j'avais appelé à l'aide m'avait suggéré une formule très heureuse: "Au delà de l'image, un réel en jeu, impossible à dire". Mais voilà l'histoire: C'est essentiellement parti d'une photo que j'ai faite d'une affiche de publicité d' un magasin de bricolage vers 1994 dans ma ville natale, et qui annonçait: "il y a du bonheur dans l'air". J'ai alors commencé à photographier la promesse de bonheur, et ce n'est pas ce qui manquait... les promesses de bonheur inondent les murs de nos villes et en effet de ce côté là on ne manque pas d'air.
De son injonction au bonheur, la publicité presse de plus en plus les regards, voire les harcèle.
Pendant ce temps la société témoigne de plus en plus de dysfonctionnements, de souffrances et de son malaise.
J'ai photographié la promesse de bonheur avec rage et frénésie pendant environ 5 années! Puis de moins en moins, jusqu'à cesser, il faut bien préserver sa santé mentale.
Parallèlement, et dans le même temps, à cette entreprise, après faire des photos, j'ai aussi commencé à les défaire: A les tailler en pièces, comme pour en décoller le sens, détacher la chose du mot dans une image et mieux en recoller les morceaux dans un pas de sens, vers un autre plus tenable, toujours ponctuel et singulier.
De l'ordre au désordre, une destruction du sens pour mieux le souligner et en conclure qu'au coeur des échecs remarquables du bonheur et de la communication, il est possible, avec enthousiasme, de se laisser aller, avec réussite, à voir venir la vie qui s'invente.

Paul Stefani (photo Invalides et photo-collage Des Agréments, ci-dessus)

Ivre de ville... Alphonsine David, extrait de la vidéo d'animation Appellation incontrôlée


Monture à fenêtre
Pour voir et penser, il nous faut une fenêtre,
Penser c'est voir d'une vision traversante, perspicace nommée perspective.
Mais laquelle ?
dormante, gisante, rampante, atticurgue,à bascule,à guillotine à deux ouvrants ou,
Pousser du regard, se planter là
Fenêtre palpébrale.
Prendre regard au monde comme on prend langue.
Peut' être
Fenêtre élidée
Je m'accroche à la fenêtre, espèce d'espace en vue, libre.

Marie Schuch

 

 

quelques vues du vernissage, ci-dessus, de gauche à droite:

La fenêtre revisitée par Marie Schuch (montures de métal, verres bleus et gazon suspendu entre 2 verres, en pleine germination

Mire Project devant les portraits marouflés de JR Expo2rue
Installation et vidéo d'Alphonsine David
Grand format, photo-collages et petits formats de Paul Stefani

Ci-contre, Manhattan Gris de Henri Maccheroni.

Emblèmes de la ville : la ville univers de toutes les pluies

Croisements
Sur des châssis de métal noir-bronze
Des signes
Incandescences troubles

Incertaines
Verticales et horizontales
Des rangées de lignes glissent
De trames en damiers
Leurs faisceaux hésitants

A l'infini
L'embrasement du regard
Des parallèles dressées se fondent
Obliques images

Enchevêtrements d'angles
Où s'écartèlent les lumières
Retombées froides qui
Blessent l'oeil

L'asphalte souillé
S'invente
Des mirages aux brillances
Visqueuses
Odeurs moites
Les vapeurs de la ville
Suintent

Surfaces lésées blafardes
Immeubles
Peuplement des humidités
Délavées

Oppression sous le pas
Les plis et recoins
D'indéfinissables rumeurs

Angoisse

Enfermement
Un ciel
Plomb
S'oxyde
Au chaos qui avorte

 

Tables d'orientation (1992-1994)
Hommage. Fondation de la ville

Stries verdâtres
Aux saillies des murs
S'étiolent les lichens

Torturées de haine
D'insolites empennages
Retiennent des géométries
Inertes

De sourdes lueurs vrillent aux
Reins

Vers la ville

Un chevauche l'autre
Le plus gris sur le plus noir
Fond de cristal mauve
Nuages
La pluie va-t-elle cesser ?
Attente
Derrière la nuit le froid
Toujours rien
Pour horizon une ligne plus sombre
Barre la fenêtre
Se déplace
Monte et descend redescend remonte encore
Ses jambes croisées gainées de couleur chair
Crissent parfois
Rien toujours rien
Oppression
Rien encore rien
Dans la fenêtre plus sombre la ligne d'horizon
Toujours en mouvement poursuit la pluie
Oppression
Ses jambes flottent maintenant sous la jupe à peine remontée
La tête dodeline
Rien toujours rien
Vingt heures zéro six gare de Lyon

Un souvenir rien d'autre

Lieu des épreuves humaines et de leurs mémoires
Des graphes et sonorités rudes
Cris hurlements
Reniements et ruptures
Cimetière des aliénations et fantasmes
Agitations, révoltes, révolutions
Dans des entrelacs de féeries inutiles
Perdurent croyances et espoirs.
Aux portals de la ville
Les vents égrènent des
Sentences

Henri Maccheroni
"L'Emblème, monumental ou non, n'est pas un ornement, un de plus de la ville, mais une désignation. Ce que l'emblème doit traduire, ce ne sont pas les éléments, même les plus singuliers d'une ville (horloges et valises près d'une gare...) mais sa réalité, sa spécificité, son essence. L'Emblème dévoile. New-York est énergie... Turin régulation... Jérusalem spiritualité... (...) Je n'en finirai jamais d'avec la ville..."
Emblèmes de la ville, la ville univers de toutes les pluies, in "Carnets", L'Amourier 1999
Henri Maccheroni a fait avec différents auteurs, nombre de livres d'artiste emblématiques de villes: entre autres "Metro", "La vallée des Dépossédés" et "Paris Ville Ténèbre" avec Michel Butor, "Jerusalem-Trèves et rêves" avec Shimon Peres, Michel Butor, Yehuda Lancry, Jacques Toledano, "Firenze adintorno" avec Jacques Clerc.


Quelques textes présents dans le recueil
PROSOPOPEES URBAINES*

"... Les villes sont des coeurs
Cernés de cîmes bleues comme la mer..."
Cécile Ouhmani

Prosopopées suburbaines


À Aimé Césaire, cette prosopopée de
la ville dont le Maire est un poète

I
Pointe des Nègres

Là débarquèrent
Naguère
Les frères
Et soeurs d'Afrique
En souffrance
Sous France
Sous-France
Déportés


Là s'épand ma gésine urbaine
Thalassique est mon hystérie
Ce ventre est ventre
De la mer
J'ai fécondé l'écume marine
Moi je pénètre, tendue
La houle porteuse de négriers
Moi j'ai pointé mon phallus
Dans l'utérus
Océan
Pour en faire naître des lots de nègres
Tout debout.


D'ores et déjà, désormais
Je fais assaut d'urbanité
Sans parvenir à oublier
Que je me nomme « Pointe des Nègres »
Dépossédée de mon nom d'Afrique


Comment me crièrent-ils
Antan
Ces enchaînés, lorsqu'ils posèrent
Sur mon écale
Leurs millions de pieds sanguinolents
Fongo ? Goà ? Goanuà ?
Ou bien Dankan ou Nchi Kavu ?

Montent à mon oreille, par gros vent
Les noms qu'ils me hurlèrent naguère
Ces rauques gosiers africains
Avant que je ne fusse « Pointe-des-Nègres »
Pendant que j'étais Pointe à Nègres
Pendant que, de mon fer pointé
Au fond des entrailles de la mer
Naissaient des lots, des piles de nègres
À l'envi
Des charges de nègres
À l'encan
De mes graines dans l'effervescence
De la matrice océane
Au temps où je violais, impavide
L'immensité caraïbe
En elle j'épandis ma semence
En plein mitan de cet océanique bassin
En sortirent des myriades de nègres
Debout
Hauts congos
Haut levés

Quel nom d'Afrique me donnèrent-ils
Avant que les leucodermes
Ne me baillent pour nom « Pointe-Des-Nègres » ?
Souf ? Terrou-bi ? Lessdi ?
De leurs cabèches esclavées
De leurs boudins
Gonflés de faim
Leurs langues asséchées d'eau saline
Du tréfonds de leurs gosiers rauquis
De tant et tant crier famine
Quel nom d'Afrique pouvait sourdre ?
Fus-je criée Mabélé, Oto
Monkili, Molongo, ou Hmsé ?
Lorsque, sur ma squame courbant
Leurs indénombrables échines
Lacérées à coups de chicotte
Se posèrent leurs pieds en sang
Couverts de chiques
Tchip! Comment avaient-ils rauqué
« Terre ! Terre ! » en leurs langues d'Afrique ?


Terre je suis, sacrée, suburbaine
Multicolore, à ce jour
en mon hypermarchand rond-point
Quelle noire lumière diffuse mon phare ?

Suzanne Dracius
Pointe-des-Nègres ( quartier de Fort-de-France, lieu de débarquement des esclaves déportés d'Afrique pendant la traite négrière.) Janvier 2006

 

Anamnésie propitiatoire

In extremis dans le Neuf cube
Exhalant le Vicks Vaporub
Tu te rues vers quoi te référer
Intra muros Neuf au carré
Jamais en odeur de sainteté
Ni en guerre contre les Gaulois
Ni contre quelque quidam que ce soit
La haine contre personne pourtant
C'est la guerre à finir toutes les guerres
Dans un bain de sang
Gnomes versus nains
La guerre à finir toutes les guerres
Résonne sous ton capuchon
À tes oreilles la chanson
Fatale police-menottes-prison
La charge
Parmi les effluves incendiaires
Tandis que d'aucuns prêchent raison
En utopie du Black-blanc-beur
Du dedans vécue comme un leurre
S'il faut remonter aux Croisades
Y a-t-il une vie après le périf
Fût-ce une gageure que tu kiffes
Tu n'as plus pour nom prolétaire
Comme tes parents en galère.
Nul ne t'appelle contestataire
Comme ceux de Mai 68 naguère
Hors du contrôle des grands frères
Tu peux faire sans
Le Neuf au carré s'encanaille
Quoi que tu fasses, taxé de racaille
Où que tu ailles, pris en tenaille
« Où qu'il aille un nègre demeure un nègre »
dixit en son temps Fanon
Tu as envie d'apprendre à dire non

Chabin de toute façon tu es mal
Pour faire « négro » tu as le teint trop pâle
Il n'y a que ta carte qui fasse sefran
Pour le reste ni assez dark ni assez blanc
Tu as plus l'air maghrébin que noir
Tu n'as jamais la bonne couleur
Pour ton malheur
Te voilà estampillé canaille
Arabe ou beur
Plus tu es de couleur
Moins tu es visible
À chaque contrôle on te tutoie
Te traite comme un chien, te rudoie
Dès que tu vois babylone, tu cours
Tu as une trop bonne tête à bavure
Nul besoin de prouver ta bravoure
Gare, si tu ralentis l'allure
Éperdu, hagard, tu percutes
Pour toi, plus dure sera la chute
Pour peu que tu te trouves au pied du mur
Si tu sautes, tu t'électrocutes
Sauve qui peut, c'est une histoire
Qui peut se terminer à coups de pied
Sous l'objectif, furtif voyeur
Très subjectivement mateur
D'une vidéo amateur.
Un gigantesque pourrissoir
Qui dégénère en bourbier,
Abracadabrantesque mouroir
Qui risque de finir en charnier
C'est la guerre à finir toutes les guerres
Dans un bain de sang
La guerre à interdire le rap
Prends garde que l'on ne t'attrape

Fille, antan, on t'a cantonnée
Derrière un métier à tisser,
De nuits de veille en nuitées
D'ores et déjà, il va te falloir veiller
Au métier à métisser
Dans la guerre à finir toutes les guerres
N'importe comment.
Hors des cités de maudition
Hors des barres de perdition
Métissage et marronnage
S'érigent
Émergent
Les deux mamelles de l'enfance
Métissage, moderne marronnage
Seule mammoplastie de l'En-France
Exutoire
Fort
Propitiatoire.
Fille, à force tu te dévoileras
Dès lors, ce vingt-et-unième siècle sera féminin ou ne sera pas.

Suzanne Dracius, Novembre 2005


Achille et Los Angeles

« Ya que también existe un infierno en el cielo
dejad que yo tabién haga algunas cosas :
yo quiero hacer un ruido con los peies
y quiero que mi cuerpo encuentre su alma. »

Achille dans la ville. Court entre les blocs, entre les parcs continue, traverse au large des cimetières. Achille court, sent qu'il court en dessous du vide, frappant le macadam avec les talons, faisant du bruit avec les pieds, claquement répété entre les hautes façades. Choc, jusqu'au sommet du crâne, choc et tremblement de chair, idée de lui-même qui grossit, image d'un bout de pain sur le marbre d'un café, le pain émietté, et Achille rempli de mie, qui court.

Autre échelle. Achille rythme de pas, petit bruit qui court dans la ville au raz de l'asphalte. Un point qui se traîne. Efforts d'Achille pour aller plus vite, et impression que tout est plus long, plus lent, sueur, chaleur, il vacille. Ne pas se laisser aplatir. Souffler à fond par la bouche, faire du bruit, creuser l'espace, exister entre les blocs. S'étirer, la tête à l'envers affronter le vide, perdre ses yeux à chercher Los Angeles de l'air. Mouvement, tout tourne. Du vide et des blocs effilés qui défilent, fer et verre, égratignant ce ventre, du ciel, lui laissant des traînées roses, lui arrachant des nuages comme des plumes, ralentis par la cime des arbres.

Courir à l'envers sur le ventre blanc de la ville entendue, labyrinthe.
Voilà. Achille, la ville, et son bruit, rien d'autre.

Il s'est arrêté à la grille du parc. Achille enveloppé de brumes que soufflent les égouts, ferme les yeux. Immobile, mais impression de vol, comme dérobé à la terre, avalé par le tourbillon, le nombril du ciel, tendu et mou. Respirer, suffoquer d'embrasser la panse frémissante, les anges au ventre jeune et vieux, s'oublier à saisir leurs vastes et tendres cuisses, et se lâcher par les espaces entrouverts, chercher la faille par où se glisser à côté des minutes et des après demain, se jeter et rebondir dans des instants élastiques, vivre mille fois plus.

Allées solitaires du parc. Aspirations haletantes, ses pas pesants sur les feuilles mortes, des coups dans ses oreilles, veloutés, son nez qui coule.

Alors il chantonne vaguement « Achille, tu n'es pas un ange », avec un drôle de goût de « flyin' home » et se met à dé-courir Los Angeles sans aucun charme, quelques plumes dans son poing crispé.

 

Nux Vomica

Nuit tombante, pluie fine. Tu marches à n'en plus finir en te donnant le tournis à regarder tes pieds et le sol qui roule. Tu marches vite pour suivre le fil de tes pensées et leur tordre le cou, voilà : faire un beau noeud coulant pour t'y accrocher. N'importe où, pour fixer tout ça, bien trop émouvant. Tu as fini par t'apitoyer toi-même, le premier dégoûté. Tu vas arrêter de faire tout ce potin, de brasser l'air pour qu'on s'occupe, de tâter ce qui n'est plus qu'à toi à travers tes poches allez, tu vois, marche encore.

Laisse derrière toi le centre, les cités, la zone pavillonnaire, les garages, les casses. Fuis la ville. Très bien pour toi ce no man's land, entre chien et loup, gris. Parfaits, les arbustes marron, sans feuilles, parsemés de cotons sales, les bas-côtés collants, grillage à gauche, l'aéroport, grillage à droite, la jaillle, et au loin des collines noires un peu carrées, raz de déchets figés.

Longer la jaille ça mène à rien, et c'est très bien puisque, justement, c'est à ça que tu veux en venir, à rien. C'est là que tu vas. Regarde un peu tout le dedans de ta tête s'étaler jusqu'à presque perte de vue, tout ce dont personne ne veut plus, qui a cessé de plaire, qui pue. La jaille, c'est du concentré, une masse noire qui déborde des grilles et remplit par endroits le fossé. Que des choses grises, noires, ou marron, et ces petits arbres rouillés, pelés, indéfinissables.

Rasé de près par les voitures qui passent à toute allure, tu grimpes sur les tas de pneus, sautes les mottes grasses, si tu pouvais te casser la gueule, tiens ça te ferait peut-être du bien. Que tu te mélanges un peu à tous ces machins et que tu deviennes marron, tiens, aussi.

Regarde, mais regarde, tu salis tout, c'est pas vrai, tu vois pas, qu'il y a un peu de rose, là, au bout de ton pied ! Oui, du rose, indécent, trop lisse. Tiens, prends-la, la petite main tendue, un petit bras de poupée en celluloïd rose.

Le gardien, il t'a vu, tu sais, il fait des signes. Mais de gentils signes, il sort avec sa torche, jovial, avec sa tête de gardien rose. Attends, il vient te parler, il saute de saloperie en saloperie, jusqu'au grillage, attends!

« Vous l'avez trouvé ! Ah ! ça fait bien six mois que je l'ai, là »
« Il va pas vous manquer ? si je le mets dans ma poche ? »
« Non, non, je pense bien que vous en ferez quelque chose, allez »

Tu essuies quelques gouttes, un peu de terre, et tu l'engouffres.
« Mais j'ai aussi des petites têtes, là-bas, vous savez, si vous voulez »

Déjà tu rebrousses.
« si vous repassez, faites-moi signe »

Le petit gardien dans sa cajute tristoune qui fait au-revoir-au-revoir de la main, sûrement l'ampoule nue au plafond et le réchaud et tout.
Allez marche, rentre, la petite main dans ta main dans ta poche.

Valérie Livory

Jaille : décharge publique en plein air.
Cajute : cabane.


Le marcheur à but lucratif
Son pas le trahit. Il marche normalement. Ses chaussures sont dites de ville. Il porte un sac Eastpack, une besace de toile, une gibecière de ville aux coutures renforcées, non qu'il traque les pigeons, il n'en voit pas, non qu'il ramasse les moineaux, il les ignore. Il se dirige d'une allure régulière de B à C, sans honorer A. Il regarde devant lui, évite les vieillardes à cabas, les femmes aux cheveux châtains mi frisés poussant des bébés, il longe les vitrines et repère les affaires sans même tourner la tête. Rien ne le freine jusqu'à la banque, la poste, la pharmacie, le magasin. Il entre comme chez lui partout, ne pose pas les coudes sur le guichet, ne se mouche pas sur les manches de la vendeuse, il sait utilement occuper son temps, il ressort trois minutes plus tard et poursuit sa trajectoire, propulsé par une dynamique dite de pure nécessité. Il parcourt la ville à bon escient, il reconnaît les rues, sait les nommer, ne se perd jamais, il évalue d'un coup d'il le meilleur rapport de traverse possible, anticipant le changement des feux rouges. S'il sait éviter d'un brusque mouvement des hanches le livreur de pizza coiffé d'une casquette rouge, il lui arrive parfois de se faire écraser, cet accident le fait devenir marcheur à terre fortuit, ce qui suffit à susciter dans la minute suivante le spectacle de rues, apprécié par la seconde catégorie.

Le Marcheur occasionnel
Il repère l'accident, détecte avant tout le monde l'arrivée des pompiers, il est le vigile non passionné des rues de la ville. Ses chaussures sont plus épaisses que celles des autres, il peut porter parfois vers la cinquantaine les godasses Mephisto, ou Damart-Oignons pour les dames incessantes. Il aime la semelle de crêpe, il aura un jour s'il persévère des Paraboots. C'est l'occasion qui le sollicite. Des amours hebdomadaires le mènent aux cinémas géants, d'autres, quotidiennes, aux brasseries d'angle, Gobelins ou rue de la Gaieté. On le voit, sinistre, près des kiosques à journaux, se dirigeant vers de grands hangars à livres à Montparnasse, on le repère à son allure concernée. Il semble dire « j'aime la ville », « demain je ferai ci », « j'irai là » mais il n'ose pas. Il lui reste dans le déhanchement une petite raideur, quelque chose de rétif dans la poussée du genou, un je ne sais quoi de prémédité et de retenu qui le distingue de l'amateur véritable. Il n'a pas une minute à perdre mais sait joindre l'utile à l'agréable. Il préfère les parcours à tiroirs. C'est dire qu'il profite des occasions. S'il voit un garde républicain, près de l'Arsenal, il ne s'en étonne pas outre mesure mais il n'est certes pas homme à ramasser le crottin en son jardinet. Il se dit à part soi, «tiens, un cheval! », sans même remarquer le cavalier honorant les devoirs de sa tâche. S'il voit couché un clochard, il le contourne ou regarde les toitures lointaines d'une ville qu'il méconnaît et qui le digère sans prendre son âme. Il n'en a pas.

Le Frénétique
Sa hâte le caractérise qui ressemble à de la rage. Il fonce, c'est le même vibrion urbain qu'on peut croiser à New-York, tant sa course est féconde. Il aime les croissants et les pains au cumin farcis de lardons et s'il se nourrit de la ville, la ville l'ignore, il trace, il accélère, il vire, il freine, il roule, il tangue, il virevolte, il plane, il glisse, louvoie et s'envole. C'est le même monté sur roulettes. Depuis peu une espèce est apparue multipérilleuse, la femme à trottinette, celle qui sait ce que vivre veut dire. Elle porte une tenue idéale, faite de noir élastique et de dépouillement longuement élaboré. L'idéal pour elle reste de rester stable sans être ridicule, ce qui élimine d'emblée le port d'un sac excessif qui déséquilibrerait sa course, le caddie, le cabas, le sac à main. On voit finement attaché aux épaules, un minuscule sac à dos plat qui n'offre aucune prise aux vents ni aux voleurs et ne contient rien d'autre qu'une carte bancaire extraplate, une carte Vitale, un paquet de mouchoirs en papiers, un préservatif, ainsi qu'un abonnement mensuel à certaines salles géantes de cinéma mentionnées plus haut. Le contenu du sac tient dans une poche. On en déduit que cet appendice dorsal, tout comme l'étui pénien de certains de nos petits camarades, est un indice hautement culturel, cachant aux yeux de tous et protégeant quelque chose de très précieux. Le contenant est le plus important. Jamais on ne voit une dame à trottinette portant un sac en plastique usagé, un sac tyrolien. Elle pourrait avoir un sac indianisant, au troisième degré de la représentation qu'elle s'offre à elle-même. Pourquoi ? Enigme des usages. La ville secrète ses codes. Lorsqu'elle aborde les halls,
elle plie élégamment son véhicule qu'elle place dans sa grande poche de manteau Kangourou. Les aisselles de la femme à trottinette sont nettes, débarrassées de toute pilosité, parfumées d'un déodorant aux fruits de la passion tenace qui évoque les bordels de Thaïlande. Elle se croit parfaite. Les gens la craignent et s'écartent de son chemin de peur d'être empalés sur ces chromes pliables. On peut exiger raisonnablement de la ville, de la Mairie de Paris une mort plus neutre. Elle peut dire d'un air féroce sous un teint de rose-Chanel « c'est plus fort que moi, je danse ma ville ». A ses pieds des chaussures Arche ou Repetto, arborées chevilles
cambrées.

Lambda
C'est l'homme gris des foules qui ne va ni ne vient. Il est partout. Il est au café sans y être allé. Il est depuis toujours là où on le repère. Il garde dans la foulée le poids du destin, la lourdeur prolétaire d'une indifférence déambulatoire. Non qu'on ne puisse le différencier. Tout le distingue. Son habit, gris, son col, gris, son eau de toilette fringante, ces chaussures avachies, son acharnement désabusé, tout l'identifie. Il est Lambda, le marcheur par excellence, ignorant des figures géométriques ainsi réalisées durant une vie de labeur. Ses trajets ne sont pas toujours les mêmes malgré la banalité qui semble à première vue le caractériser. Lambda se rend à son travail ou s'il n'a pas de travail il en cherche encore et toujours. Dans l'un et l'autre cas, Lambda est le même. Il n'a pas de regard, il ne voit rien, il avance. Ce n'est pas l'homme des foules, l'homme qui traverse les murailles, ce n'est pas celui de la rue Watt. Lambda, c'est l'homme des villes, qui semble savoir où il met les pieds, il détecte les bouches d'égout, il repère les poubelles où jeter papiers, billets de loterie pliés en quatre, tickets de métro, clopes roulées et journaux. Muni d'un simple podomètre, Lambda ferait merveille. On pourrait récupérer son énergie musculaire, toute naturelle, en faire de l'électricité, gratuite, illuminer notre joyeuse ville. Que de surprises, que de distances, que de
pointillés, que de traces, que de cercles, que de figures !Lambda, mon frère, est le champion invraisemlable des figures complexes. Un fil d'Ariane le relie lundi du banc public au ciel trop bas.

Le passant rimbaldien
Il est le marcheur essentiel, celui qui est porté au ciel par le macadam et la poussière. Habillé n'importe comment il se nourrit de n'importe quoi acheté chez des Turcs dans des échoppes tenues secrètes. Il, elle marche en flânant, chaque pas l'emporte, le conforte, l'authentifie. Solitaire, il, elle va des quais d'Austerlitz à la Gare du Nord dans un élan magnifique, nourri de fines observations sur les murs et les ruelles initiatiques. N'importe quel nom de café fait naître chez lui de curieuses lueurs, d'étranges sous-entendus.
Ce marcheur élu se fait parfois écraser par un autobus, comme Roland Barthes, décrypteur promotionnel de nos jeunes années nourries de bavardages excessifs. Il lui arrive de survivre. Unique, il est irremplaçable. On le trouve souvent sur les toits, elle aussi : Tour de Notre Dame, Café de la Samaritaine, ailleurs encore, Hôtel Nikko, terrasses infranchissables de Jussieu, barbelés, miradors, murs d'enceintes, arches et terrasses en jachères.
Au marché de la poésie, il prolifère mi-Mai. C'est un spectacle navrant. Sa gueule intéressante d'individu mal rasé, cette troublante tronche de circonstances inspirées, est dupliquée à l'infini. Un poète, oui, le veuf, oui, l'inconsolable, oui, cent, non.
La difficulté d'un tel marcheur, conscient de sa démarche et la revendiquant comme l'ultime aventure de sa résistance, est qu'elle se veut impersonnelle, détachée, mystique, anonyme, perdue. Si le rimbaldien se découvre, « je suis le grand Zéphir », « je suis le Rumi des dames et l'Alpha de l'Univers », il perd la grâce, la force, il dépérit et se banalise. Il devient Lambda-laborieux, le prolétaire des mots. Ce qu'il gagne en grandeur il le perd en ridicule. Il prend la pause et fait des mines cherchant l'outrage, qu'il provoque. S'il reste caché il dépérit ivre d'alcools bon marché ou de fatigue en excès. L'impuissance rageuse a raison de sa quête. Il est foutu. A quand les cercles des monologuants anonymes, se réchauffant indiens à des feux toujours allumés, poutrelles et cageots aux abords des villes. Ivry ? Vitry ? Charenton ? Repoussés ailleurs, au-delà des murs de la ville, non seulement ils se croisent sans faire le moindre effort pour se repérer inhumains ou se reconnaître semblables, mais abandonnés par leur feinte à la solitude, fils orgueilleux d'un vent qu'ils vénèrent et croient posséder, pères abusifs d'une parole qu'ils pervertissent en la vénérant, dépossédés des mots qu'ils trahissent, ils se perdent de vue, s'ignorent, se méprisent et désespèrent, imbus de vains prestiges et d'une gloire fantomatique.

Je ne suis pas rimbaldienne professionnelle. Je vais là où je dois aller. Je traverse les jardins tous les jours. Aujourd'hui je fais ça, sous la pluie, j'y vais, là-bas, vers l'autre porte de fer. La vie, avec les seuls yeux je la distingue à peine : plumes, passants, arbres et feuilles.
Laissez-moi passer, rien de plus.

Isabelle Dormion,
voir aussi : "L'autre place", Turbulences du 27 février 2006



Et partout
des poissons sales
jetés vivants dans des coins
au milieu des trottoirs
se couvrant de poussière
plutôt poissons plats
genre turbots
genre baudroies
et
puisque agonisant
lentement amplement respirant
comme font, hors de l'eau, les poissons.
Et encore
posés comme des gens assis
sur des bancs
des chaises de fer
chaises de jardins publics
des têtes de bêtes à cornes
et
généralement
têtes noires
massives
taureaux
avec
pour décorer
des restes de cigares
glissés entre les dents
des bouteilles de bière vides
fichées par le goulot
à la pointe des cornes
et
sur les crânes ou les nuques
les cous
blanc sur noir
des dessins à la craie
marelles
ou phallus
fellations
ou
drapeau noir des pirates
et
ronds, sphères, cubes et croix : maisons
chiffres 7 et 3.
Tombe la nuit
pleine lune se lève
viennent les éboueurs.


Parmi
les multiples rites
cérémonies
ayant
incorruptiblement
franchi le temps
le plus remarquable
peut-être
est le concours d'architecture.
Il s'agit
pour les participants
- architectes, ouvriers, terrassiers, maçons, plâtriers, tailleurs de pierres et de bois, manuvres, cimentiers -
de prendre d'assaut telle ville
d'en raser les bâtiments
monuments
et
sur ses ruines
élever une cité neuve
authentiquement nouvelle
en ne se servant que
- dicte précisément la règle -
des matériaux mis à bas
des décombres
colonnes et pierres
briques et tuiles
charpentes
métaux.
Débris.
Eclats.
Amas.
Le résultat de cette architecture
utilisant le vieux
la ruine
pour construire
accéder au nouveau
est
chez ces gens
appelé
Beauté.


Quand le goût
l'élan
la force de vie
a disparu
souvent
les évidés
les abîmés
les épuisés
vont jusqu'au quartier du vieux rempart.

à distance
face au vieux mur
sur ce qui fut place
agora
puis parking
aujourd'hui grand lieu désert
se dresse la catapulte.
En bois
bardée de fer
d'imitation romaine
le bras tendu
la grande machine
sans doute
paraît silence
force mystérieuse.
Comme un escalier solitaire
les marches
d'un large escabeau
mènent à cette extrémité creuse
qui fait tant ressembler le bras des catapultes à une cuillère géante.
Dans ce creux profond
l'adolescent, l'adolescente
la femme
l'homme
l'individu
se serre, se couche, se love.
Quand le corps ne bouge plus
quand le corps est en place
ajout moderne
un mécanisme s'enclenche
lentement
sous ce poids immobile
le bras s'abaisse.
Comme il y a crochet
comme il y a anneau
lentement
le croc sort de l'anneau
puis
avec des sifflements
avec puissance
ce qui était cordes tendues se détend
le bras part en avant
à la verticale heurte la butée
paraboliquement lance le corps.
Projeté dans les airs
le corps si soigneusement lové
se désarticule
et c'est comme faisant de grands signes avec des bras écartelés
qu'il s'écrase dans les hauteurs du vieux rempart.
Cependant
parfois il arrive
que dans sa course vers le mur
le corps reste en boule
et c'est alors
comme avec plus de vitesse
de violence
d'acharnement
qu'il s'y fracasse.
Dans l'heure qui suit
au pied du rempart
le corps est ramassé
le bras de la catapulte retendu
le crochet crocheté dans l'anneau.
Quand aux grandes taches de chairs et de sang maculant la vieille muraille, comme le pays est pluvieux, elles s'effacent rapidement.

Ce n'est qu'une ville
une unique ville
une ville qui n'est pas à l'écart
puisque des routes y mènent
puisque des routes en partent.
Une ville ayant
ou ayant eu
sa gare de chemin de fer
une ville possédant
à l'extérieur
parmi les champs
la piste herbeuse d'un aérodrome de campagne.
Une ville où une nuit
une nuit qui dure longtemps
probablement une nuit proche du solstice d'hiver
chaque homme, chaque femme
chaque adulte en âge de procréer
brûle les livres qu'il préfère
les livres qu'il aime le plus
jette aux flammes les livres de sa vie.
Cela se passe sur une place.
Autour de la place
circulairement
des gradins sont dressés
sur lesquels des enfants
les enfants de ces adultes jetant au feu les livres de leurs vies
regardent l'incendie
regardent l'autodafé.
Le dernier livre jeté
le dernier livre brûlé
en silence les parents reprennent leurs enfants
en silence s'en vont main dans la main.
Ce silence c'est le silence oxymore.
Le silence où sans aucune parole quelque chose a été dit.
Le silence où sans que rien ne soit dit quelque chose est entendu.
Car seul le silence oxymore
peut pour nous à notre place
nous expliquer
pourquoi
plus tard

bien des années plus tard
dans cette ville
sur cette place
alors que les parents ont disparu
que les enfants ont grandi
que chaque petit garçon est devenu homme
et chaque petite fille femme
pourquoi
une nuit qui dure longtemps
ces enfants devenus parents
brûlent
devant un public d'enfants fait de leurs enfants
en silence
les livres de leurs vies.

Bruno Edmond


Blasons à la ville aimée
Jeu de pastilles, rimes en tête

Le jour
Se lève sur tes faubourgs.
Transpercées de lumière, tes grises loques de brume
Enfin s'effilent et fument.
Ma vil
le !

Ile assise
Sur une terre indécise !
Bloc sur bloc, mur après mur, pierre à pierre,
Te bâtir en hâte, inachevée te défaire et sans fin te refaire,
Ma v
ille !

Vile ambition
Des princes au nom desquels ta fondation,
Ta dévotion, tes conversions, tes révolutions, sont le jouet
De mille fortunes variées,
Ma
ville !

A villipender
Tes insalubrités, à tant désirer t'amender,
Qu'on se complaise toujours! Tu es belle de tes cicatrices,
De tes appendices, de tes rues subreptices,
M
a ville !

Ma vie le ressent,
Ce besoin de toi, inlassablement,
Me ramène à tes labyrinthes où geint une intranquille houle.
Tu me portes, je te foule,
Ma ville !

May Livory, février 2006



*Prosopopées urbaines
Chants de la ville, chants des îles, chants des îles-villes, ces "Prosopopées urbaines" exaltent l'imaginaire poétique d'auteurs contemporains d'horizons divers de la francophonie, - d'Haïti, Martinique, Guadeloupe, Tunisie, Corse, Ile Maurice, Ile de France et Sénégal.
Ouvrant la voie à ces voix inédites d'urbains, l'universel chantre de la Négritude Aimé Césaire conte dans un entretien sa rencontre à Paris, dans les années trente, avec ces deux grands poètes sénégalais disparus, - dont nous célébrons cette année le Centenaire, - Léopold Sédar Senghor et Birago Diop, francophones et fondamentalement africains.

Table de "Prosopopées urbaines", anthologie d'inédits:
7 Avant-prosopopées
12 Photographie d'A. Césaire et L. S. Senghor en Martinique
13 Entretien avec Aimé Césaire
24 Photographies d'Aimé Césaire et Suzanne Dracius
27 Louis-Philippe Dalembert
35 René Depestre
43 Birago Diop
53 Photographies de Birago Diop
55 Isabelle Dormion
67 Suzanne Dracius
85 Maguy Durcé
91 Bruno Edmond
101 Jalel El Gharbi
107 Jacques Fusina
115 May Livory
121 Valérie Livory
129 Patrick Mathelié-Guinlet
137 Jean Métellus
147 James Noël
155 Cécile Oumhani
163 Max Rippon
169 Amadou L. Sall
175 Umar Timol

17,80 euros - 188 pages - Mars 2006
ISBN (10) 2-915247-05-6

Nouveautés Desnel mars/avril/mai:
1848, CHRONIQUE DE L'ABOLITION DE L'ESCLAVAGE, de GILBERT PAGO: chronique au jour le jour des dix semaines qui ébranlèrent la Martinique, FABLES DE LA FONTAINE avec adaptations créoles d'hier et d'aujourd'hui et sources (présenté par SUZANNE DRACIUS, illustré par CHOKO), PAROLE DE BANLIEUE, de DIDIER MANDIN, roman.
Éditions Desnel
http://www.desnel.com


à suivre...