Suites Trikhographiques
Ce n'est plus la mèche
de cheveux, ni le cheveu sur la langue ou la soupe, dans le médaillon
ou l'ourlet de la mariée.
Ici on couche les cheveux par trois, on les range par deux.
On les tricote à quatre, à six brins, on les courbe
en cinq sept.
On les immobilise d'un geste de colle minutieux et verni.
Trois suites où chaque note est graphe précis,
ligne diaphane, patte d'insecte, zébrure légère
à la limite de l'invisible. Avec cette énergie
contenue du trait qui n'a pas été tracé.
Réminiscences en forme de bord de lavabo, de pelle du
coiffeur, de serviette éponge où la nerveuse cambrure
du cheveu défie le pli.
Cette fine courbe tendue,
reconnaissable entre mille, est là donnée à
voir comme jamais.
Le grain du papier et sa ligne, seulement. Le cheveu, un à
un, juste posé.
May Livory, Août 2000
une suite en
cheveux comptés,
une suite en cheveux courbés
une suite en cheveux croisés...
et une table d'évocation
dressée, en attente de souvenirs à coucher sur
le papier...
Le désir
provoqué par le contact d'une chevelure,
la surprise créée par sa première coupe,
le doute installé par un cheveu inconnu,
le mal-être que procure leur absence,
ou le plaisir qu'engendre leur vitalité,
vous ont peut-être, un jour, envahi.
Souvenirs, fantasmes,
rêveries, les cheveux agissent comme des sortilèges.
Porteurs d'évocations multiples,
ils font surgir images, pensées ou sensations que le papier
peut recevoir et faire partager.
Josiane
photos ©Omar Martinez
Regards
Isolés,
les cheveux restent vivants. Ils évoquent d'étranges
autoportraits de l'artiste. Ils sont le fantôme d'une chevelure.
Les cheveux "enluminés" de henné deviennent
des lignes de feu et de
sang, des écritures
broussailleuses, ébourriffées, des zones hasardeuses.
Gilbert Lascault, "Regard
critique" sur Josiane Guitard-Leroux (extrait), Salon Jeune
Peinture 1998.
Il y a de l'être
dans le cheveu, de l'ontologie dans le henné.
Le roux des cheveux de Josiane Guitard-Leroux n'est pas
étranger à cette substance; d'ailleurs, rien de
ce qui est capillaire ne lui est étranger.
Avec l'oeuvre de Josiane Guitard-Leroux c'est un peu d'hair qui
entre dans le monde confiné du minimal art.
Emmanuel Brouillard, "En
Résonnance littéraire" avec Josiane Guitard-Leroux,
Salon Jeune Peinture 1997.
J'entrevois ce qui ne saurait
se voir: l'absence.
Le fantôme de la chevelure prenant parfois des airs de
toison, échappée des limites d'une transparence
qui joue à disparaître.
J'ai vu une araignée
brune et rousse qui retient le temps dans sa chevelure, de ses
doigts lents et silencieux.
Véronik Olivier, plasticienne,
Paris, juillet 1997.
J. Guitard-Leroux prend
le regard du spectateur au piège
de sa toile, qu'elle tisse
à partir de ce presque rien de son corps dont on ne sait
quoi.
Cette manière de mettre un cheveu sur la soupe de nos
certitudes, nous rappelle que notre foi à ne croire que
ce que l'on voit, nous ment chaque fois que nous ne sommes pas
capables de regarder.
Nouer ses cheveux au fil
de leur chute c'est bien tisser le récit de la perte de
son corps, préfigurer par ce jeu infiniment modeste son
anéantissement.
Mélancolie, préfiguration de la mort, motif qui
motive tout récit, peut-être?
Montrer ce qui n'est pas regardé, tisser cette partie
ténue et détachée du corps, peut-être
que les travaux de Josiane Guitard-Leroux ne racontent que cela,
mais en cela ils se posent déjà comme un échange.
Échange produit par le frottement de l'être au monde.
Serge Faucher, Clichy, juin
1999
suite... sur le
site et sur le
blog de Josiane Guitard-Leroux
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