Vladimir Borensztajn
autoportrait

 Anachroniques
six stèles

I Le vent s'est assagi. Pour que la pluie t'apaise,
ne crains pas de l'appeler à grands cris, comme je l'ai fait maintes fois.
Et tu prétends, toi, hâter le cours des choses ?

II Que ta main lance les dés
Cède ton sommeil à l'incrédule
Donne-lui donc les nuits promises !

III J'attends debout le messager, le dernier des tiens.
Ne le soumets pas. J'ai pour lui du pain et de l'eau fraîche.
Il peut se reposer là jusqu'au matin.
Ne regarde plus le ciel, la nuit efface les ombres. Ne sois plus inquiet.
La pierre est dressée à la place qui lui est assignée depuis des années.

IV La quatrième pierre n'a pas laissé de trace. Trop lourde pour être portée.
Personne ne viendra plus voler l'habit que tu tiens serré.

V Les lueurs là-bas ? Des feux la nuit pour leur vigilance assoupie.
Un sceau, dis-tu, témoignerait davantage ?
Il lui a laissé en gage son sang même, rien de plus.

VI Ils ne dorment plus, ils veillent, harassés, sans entendre le cri des oiseaux
qu'un homme en trébuchant a délogés de la pierre.


Isabelle Dormion (in Revue Rehauts N°4)

Vladimir Borensztajn (novembre 1939 - août 1997)
peintures, sculptures, dessins
exposition-hommage, du 7 au 21 mars 2001 à La Loge


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