9/9/99 rue
du Pont-Neuf Paris 1er... on invente
la première "faites d'inutilité publique"...
s'il fallait justifier le
fait de rassembler des objets réputés inutiles
comme des oeuvres d'artistes vivants et de les mélanger
sans l'ombre d'un jugement de valeur marchande ni critère
de tendance ou de mode du moment, s'il fallait justifier de faire
dans cet esprit plus de quatre expositions thématiques
de qualité par an depuis 1994 dans un lieu aussi exigu
et aussi peu prestigieux qu'une loge de concierge... et de prolonger
encore cette expérience dans toute une rue... s'il le
fallait vraiment, je n'hésiterais pas à reprendre
ces mots de Robert Filliou, que "l'art c'est ce que
font les artistes".
Créons nous-mêmes notre "émerveillisation".
Dans cette rue qui voit passer chaque jour des milliers de gens
différents, touristes, personnel de la Samaritaine, employés
de bureau, créatifs d'agences de pub, voyageurs de toutes
sortes, vendeurs de voyages, de sommeil, laveurs de carreaux,
postiers, livreurs, balayeurs, gens de la nuit, gens du petit
matin, enfants qui vont à l'école, étudiants
d'école de design à la mode, acheteuses de mode
sortant des défilés du Carrousel, vieux qui ne
savent que faire d'eux-mêmes, jeunes à roulettes,
amoureux, vendeuses d'amour, de crèmes de beauté,
de croissants chauds, vendeurs de merveilles made in Hong Kong
ou de roses en cornet; les curieux, les tristes, les étranges,
les perdus, les de-passage, les revenus-de-tout, les toujours-pressés.
Et ceux que nous avons écoutés en buvant un coup
sur le zinc...
Edito de "la Concierge"
Le Petit Noeuf Illustré, collection Journal d'un Jour,
édition
Barde la Lézarde
*L'expression "inutilité publique"
a été piquée (avec sa bénédiction
épistolaire) à Joachim Pfeufer dans un entretien
avec Robert Filliou dans les années 70 sur les projets
de centres de création permanente, "Tour Historique"
et "Poï-Poï," il y est fait hommage dans
Le Petit Noeuf Illustré.
"Est-ce
que le fait de créer vaut tous ces efforts, cette discipline?
En fin de compte je ne suis qu'un tout petit peu mieux en tant
qu'homme que si j'avais tout laissé tomber. Et même
cela est loin d'être sûr (...) On ne devra pas
arrêter de créer. On ne peut pas se le permettre.
(...) Ce que je dois partager avec tout le monde, c'est le tour
de main de la création permanente." Robert Filliou
- Manque d'appuis
et de complicités, plan vigipirates, difficultés
de tous ordres, dont en premier lieu l'impossibilité d'obtenir
une autorisation, font que pour le moment, il n'y a plus de projet
de faites d'inutilité publique en tant que telle. Nous
nous permettons seulement depuis 2000 quelque débordement
lors d'événements officiels comme le Printemps
des Poètes en mars ou la nuit blanche en octobre, et d'accrocher
à la fenêtre des "installations urbaines",
et sur la porte de la Loge de la Concierge des kakémonos,
lisibles par tous en passant, lors des expos. -
Souvenir
d'un vrai bistrot parisien:
Le Pont 9,
où
Fredéric Kerner, complice de la "faites d'inutilité
publique", avait créé un de ces endroits où
l'on "rend les solitudes heureuses": maintenant repris
par une nouvelle équipe et modernisé chic, car
Fred, parti vers d'autres contrées, n'y exerce plus.